mercredi 30 novembre 2011

Suicides assistés en Suisse

Depuis hier, l’Italie est traversée par une polémique au sujet de la mort du journaliste Lucio Magri, ayant choisi de quitter ce monde à travers le suicide assisté. Pour différentes raisons, j’en suis venue à parler à plusieurs reprises de ce choix au cours des derniers jours: tout d’abord à cause du post précédent sur les suicides en Chine, puis suite au geste de Magri et enfin parce que ce n’est pas très rassurant de lire “tendances suicidaires et suicideparmi les effets secondaires du médicament que je prend tous les jours. Yeux roulants

Il faut savoir qu’en Italie, comme dans beaucoup d’autres pays, le suicide assisté n’est pas autorisé, ce que je trouve incontestablement barbare: si, depuis 1880 au moins, la revendication politique “Ni Dieu ni maitre” existe et peut être énoncée, pourquoi ne pourrait-on pas décider de sa dernière heure? Et pourquoi ne pourrait-on pas en décider dans la dignité et la sérénité? (vieux débat que celui touchant à la vie et à la dignité en Italie, si on songe par exemple au temps qu’il a fallu pour introduire la pilule abortive RU-486, légale en France depuis 1988 et en Italie depuis la fin 2009 Surpris).

Pour en revenir au suicide assisté, en discutant avec des amis je me disais que, bien que partir de son propre chef soit plutôt admirable (ne ce fusse que par le courage que cela requiert), une pratique comme celle du suicide assisté doit être assez bizarre, puisque tout le monde sait où, quand, comment et pourquoi on s’en va. Non seulement on a le courage de décider de sa propre mort, mais en plus on assume les adieux et l’angoisse qu’ils peuvent susciter. En même temps c’est tellement délicat comme sujet qu’on ne peut pas vraiment exprimer une opinion: chacun décide pour soi-même et avec soi-même, et selon moi tout ce qui importe est d’avoir les instruments et d’être assez serein pour pouvoir prendre l’une ou l’autre décision en toute conscience. Ce qui est sûr c’est que ça doit être affreusement dur de s’en aller ainsi: déjà il faut être sacrément forts pour consoler tout le monde…et puis on fait comment pour choisir quel sera son dernier vin, sa dernière chanson ou sa dernière balade? Pas facile, surtout à notre époque (disait Michel Foucault: “La philosophie antique nous apprenait à accepter notre mort. La philosophie moderne, la mort des autres”).

Il faut sans doute être exceptionnels et avoir une conception très élevée de la vie, de la mort, de la dignité. Un bel exemple de cette exceptionnalité est celui de monsieur Jean Aebischer, qui en 2004  a accepté d’être le protagoniste d’un magnifique documentaire réalisé autour de son choix de quitter cette terre à travers le suicide assisté. C’est une leçon de vie et de dignité extraordinaire, que de nombreux opposants du suicide assisté devraient regarder – particulièrement dans un pays comme l’Italie. Tenez vos mouchoirs à porté de main parce que ça fait beaucoup pleurer. Bonne route!


Le choix de Jean par GrOuMe

samedi 26 novembre 2011

Suicides chez Apple

Depuis quelques mois on remarque une surexposition médiatique de la marque Apple, d’abord par rapport à la mort de Steve Jobs (paix à son âme…mais en même temps tellement de pères et mères de famille meurent chaque jour qu’on ne comprend pas trop pourquoi on devrait en faire un symbole..d’autant plus qu’il a quand même vécu beaucoup mieux que la plupart des gens), et ensuite par rapport aux conditions de travail des ouvriers dans les ateliers produisant des jolis gadgets tel l’iPhone, l’iPad etc…et notamment aux taux de suicide dans ces ateliers.

Comme Michel Foucault nous l’a appris, le suicide est un phénomène qui a suscité l’intérêt de la sociologie depuis le début, puisque il se situe à l’interface entre le pouvoir de la collectivité sur la vie (le bio-povoir, avec ses différentes technologies telle la sexualité) et le pouvoir de l’individu sur sa mort. Apparemment le suicide continue de fasciner non seulement les sociologues, mais aussi les citoyens alpha, qui ces derniers jours sont montés aux barricades en criant que le taux de suicide dans les usines Apple est extrêmement élevé. Ainsi cette semaine on a pu lire (entre autres ici) qu’une ouvrière chinoise s’était donnée la mort dans l’usine Foxconn (employant 400.000 personnes), faisant ainsi monter à 13 le nombre total de suicides cette année.

Or, si on prend les statistiques officielles de l’OMS (disponibles par exemple sur Wikipédia), on lit que les taux de suicide de pays comme l’Italie, la Suisse ou la France sont assez élevés: 5.2 suicides par 100.000 habitants en Italie, 14.4 en Suisse, 16.2 en France. Ceci veut dire que pour une population de 400.000 habitants, on aurait eu (en moyenne par année) 20.8 suicides en Italie, 57,6 en Suisse, 64.8 en France. Pour ce qui est de la Chine, on a un taux de suicide de 13.9, ce qui pour 400.000 habitants nous donne une moyenne de 55.6 suicides par année. Face à ces chiffres, on peut  dire que le taux de suicide dans l’usine en question est remarquablement bas par rapport à celui du pays, et en plus on peut supposer que les conditions de travail y soient remarquablement bonnes (au vu de la différence significative par rapport aux autres moyennes).

Morale: il ne faut pas faire confiance aux statistiques si on ne les a pas vérifiées par soi-même… Si on est un peu doué avec les calculs et avec la rhétorique, on peut faire dire aux chiffres tout ce qu’on veut.

Pour rester en thématique “suicidaire”, voici la très belle vidéo de “Pure Morning” des londoniens Placebo. Bonne route!



Placebo - Pure Morning par zelesfrost par boufougik Placebo, Pure Morning

mercredi 23 novembre 2011

Asthme

Comme certains le savent déjà, je suis atteinte d’asthme depuis déjà un petit moment, et cela me cause des désagréments de temps en temps, jusqu’à parfois me contraindre à rester à la maison. Je ne suis certes pas la seule: selon l’OMS, 235 millions de personnes dans le monde souffrent d’asthme, dont 80% dans les pays en développement. Ces chiffres risquent cependant d’être sous-évalués: en effet, selon l’Asthma and Allergy Foundation of America (AAFA), seulement aux USA on compte 20 millions d’asthmatiques et 4.000 morts à cause de l’asthme chaque année. Des autres données sont encore plus alarmantes: selon le Centre for Disease Control and Prevention (USA), 24.6 millions d’étasuniens souffrent d’asthme et ces chiffres ont beaucoup progressé en moins de 10 ans.


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Voici une carte élaborée par BBC News, où on voit le pourcentage de population asthmatique dans les différents pays du monde. Il faut souligner que dans les pays en développement le diagnostique n’est probablement pas aussi précis que dans les pays développés, ce qui explique en partie les différences.

En somme, cette maladie touche une partie de la population grandissante et certains vont jusqu’à parler d’épidémie d’asthme, comme l’American Chiropractic Association (ACA).

Mais, qu’est-ce que l’asthme au juste?

Il s’agit d’une maladie inflammatoire chronique des voies respiratoires, qui se manifeste avec de la toux, de la sibilance, du broncospasme (c’est à dire une contraction des muscles des parois bronchiales, ce qui laisse moins de place pour le passage de l’air), de la dyspnée (souffle coupé).

Définition de l’asthme par le Dr. Huchon, Chef du service de pneumologie, Hôtel-Dieu, Paris

C’est une maladie incurable, mais qui peut toutefois être gérée efficacement, sans qu’elle donne trop d’inconfort.

Les causes

Normalement, on croit que l’asthme est due à une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux. En effet, au delà des éventuelles composantes héréditaires, l’inflammation est souvent provoquée ou entretenue par des éléments qui se trouvent dans l’air qu’on respire, et auxquels on est allergiques ou hypersensibles. Ces éléments peuvent être des plus divers: acariens, pollens, fumée passive, air trop froid ou trop sec, pollution, substances chimiques…

La crise d’asthme

Quand un asthmatique entre en contact avec ces substances, ou bien quand il est malade (par exemple suite à une infection virale), ses voies respiratoires s’irritent et sécrètent du mucus et leurs muscles se contractent, rendant la respiration difficile. Cet état, qu’on appelle crise d’asthme, peut durer quelques dizaines de minutes ou quelques jours, et passer tout seul ou avec l’aide de médicaments.

Explication de la crise d’asthme par le Dr. Huchon, Chef du service de pneumologie, Hôtel-Dieu, Paris

On reconnait une crise d’asthme au fait qu’on a de la peine à respirer, qu’on tousse, qu’on transpire, qu’on a les ongles bleues et qu’on est apeuré; souvent seul un ou deux de ces symptômes sont présents.

Chez le médecin, on peut aussi reconnaitre une crise d’asthme à l‘aide de plusieurs instruments, comme le débitmetre de pointe (peak flow meter, cf. image ci-dessous) et le débitmetre numérique de pointe, qui permettent de mesurer la quantité d’air qu’on arrive à expirer et de la comparer avec des courbes de valeurs moyennes.

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Les traitements

Il existe deux sortes de traitement, un traitement de maintien et un traitement d’urgence.

Le traitement de maintien sert pour éviter que les voies respiratoires soient trop réactives et qu’elles s’enflamment. Il est souvent composé par des corticostéroïdes, des antileucotriènes; plus rare est l’emploi d’anticholinergiques. Il faut le prendre tous les jours selon les prescriptions du médecin et il ne faut surtout pas arrêter de le prendre parce qu’on se sent mieux (si on va mieux, c’est justement parce qu’il marche!). Il existe plusieurs manières de prendre le traitement de maintien: les aérosols pressurisés (aérosol-doseur ou “pompe”), les diskus, les séparateurs (chambres de retenue ou “spacers”), les inhalateurs de poudre sèche, les tablettes à mâcher.

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Aérosol-doseur

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Diskus

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Séparateur

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Inhalateur de
poudre sèche

Le traitement d’urgence sert pour éviter qu’une crise d’asthme ne devienne trop grave (ce qui pourrait laisser des séquelles ou même avoir des conséquences mortelles). Il se résume souvent à des bronchodilatateurs, comme le salbutamol (Ventolin) ou la théophylline, et à des anticholinergiques (buthylscopolamine). Un asthmatique doit toujours avoir ses médicaments d’urgence sur soi, où qu’il aille, parce qu’une crise peut se déclencher à n’importe quel moment. Il faut prendre le traitement d’urgence quand on sent qu’on est en train d’avoir une crise, le plus tôt le mieux.

Des traitements complémentaires, comme par exemple les fumigations avec les huiles essentielles, peuvent aussi être utiles, mais ils doivent être évalués au cas par cas par le médecin (notamment pour éviter l’apparition d’allergies).

L’idéal est de toujours avoir sur soi son propre plan d’action contre l’asthme, compilé avec l’aide du médecin, pour savoir comment se comporter en cas de problèmes. En tout cas, si malgré les mesures d’urgence une crise ne passe pas, il faut appeler les urgences et aller voir un médecin tout de suite.

Comment vivre avec l’asthme au quotidien

L’asthme peut être une mauvaise bête, mais tout s‘améliore si on arrive à bien la maitriser et à s’approprier certaines techniques, par exemple pour la prise de médicaments. Pour cela, la première chose à faire est d’avoir une bonne communication avec son médecin et d’établir un plan de traitement et un plan d’action (dont l’utilité est démontrée ici).

Ensuite, il faut apprendre les bons gestes, par exemple pour utiliser les inhalateurs. Pour cela, on peut demander à son médecin ou à son pharmacien, ou s’informer dans une des nombreuses associations de malades.

Il ne faut pas utiliser l’inhalateur comme cela! :)

Ces associations sont nombreuses et en plus elles permettent de ne pas se sentir isolés; parmi elles, on peut mentionner la Ligue Pulmonaire (CH), L’Association Pulmonaire (Canada), l’Asthma Society (Canada), Asthma New Zealand – The Lung Association (Nouvelle Zélande), Asthmatiic (France et pays francophones), Asthma and Allergy Foundation of America (USA).

En plus, il faut s’informer pour bien connaitre sa maladie et la manière de prévenir les crises. Heureusement beaucoup de sites internet expliquent l’asthme en détail, et cela pour tous les publics et pour toutes les âges. En particulier, je vous conseille de visiter: AsthmaKIDS.ca, dédié aux jeunes enfants asthmatiques; Place ISA, dédié aux adolescents asthmatiques; Taking Control of Your Asthma, dédié aux adultes asthmatiques; vous pouvez aussi lire la brochure You Can Control Your Asthma, qui donne un aperçu rapide de la maladie et des facteurs déclenchant des crises.

Il peut aussi être utile de tenir un journal de l’asthme, où prendre note de l’évolution de la maladie au jour le jour. En outre, il faut bien veiller à la propreté des endroits où on vit et on travaille, qui doivent être exempts de poussière, moisissures, poils d’animaux, résidus alimentaires et pollens, et qui doivent être fréquemment ventilés (pour une liste des éléments critiques, voir ici et ici)

La prévention des crises d’asthme expliquée par le Dr. Huchon, Chef du service de pneumologie, Hôtel-Dieu, Paris

Enfin, il est recommandé de contrôler les prévisions polliniques et de pollution atmosphérique et de limiter les sorties si les index sont trop élevés. Des prévisions polliniques à jour peuvent être consultées sur PollenUndAllergie (CH), PolliniEAllergia (Italie), Pollen.Com (USA). Des prévisions sur l’ozone et les particules fines à jour peuvent être consultées sur Meteotest (CH), IlMeteo (Italie), AirNow (USA), PrevAir (France et Europe).

On a donc toute une série d’outils qui permettent de mieux connaitre la maladie et de mieux la maitriser, il faut les utiliser! Et il ne faut pas oublier que la prévention est indispensable (pas de fumée, pas de pollution, pas de poussière).

Puisque on a parlé de respiration, pour nous quitter voici une chanson que j’aime beaucoup (malgré l’atmosphère triste de la vidéo, faisant référence à l’histoire de La petite fille aux allumettes), Breathe des britanniques Erasure. Bonne route!

Erasure, Breathe

lundi 21 novembre 2011

Herman Dune @ Romandie, Lausanne


Jeudi dernier (17 novembre) on a enfin pu assister à un concert du groupe français Herman Dune, qu’on affectionne depuis plusieurs années mais qu’on n’avait jamais eu l’occasion de voir en live.

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Le concert, prévu pour 21h00, a commencé vers 21h10 avec une performance de This is the Kit (band solo de l’anglaise Kate Stables, qui chante et joue de la guitare).

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Malgré quelques mélodies agréables, ce lancement de concert était globalement décevant: lent, pas très varié (un peu ennuyeux diraient les méchants) et avec beaucoup trop d’ululements. C’est un peu dommage, parce que malgré l’énergie que la chanteuse mettait à l’œuvre, elle n’avait pas assez de voix ni suffisamment d’originalité dans la composition. Bref, une introduction qui a refroidit l’ambiance au lieu de la réchauffer.





A 22hh15 le vrai concert a enfin commencé, avec l’apparition sur scène de David-Ivar Yaya Herman Dune (voix et guitare, ci-contre), Néman (Cosmic Néman) Herman Dune (percussions) et Ben Pleng (basse).

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Dans un Romandie bondé, le groupe a commencé avec son dernier succès, “Tell me something I don’t know”. On avait apprécié ce morceau déjà en voyant la vidéo, avec un petit bonhomme bleu (un Yeti fugitif) et une atmosphère assez spéciale, et la performance en live ne nous a pas déçu.

Les Herman Dune ont enchainé leurs morceaux les plus connus (On a Saturday, Pure Hearts, Your love is gold, I’d rather walk than run, When the water gets cold and freezes on the lake, Lovers are waterproof, juste pour en citer quelques uns). Les chansons ont été souvent retravaillées pour la version live, avec des percussions et le basse beaucoup plus présents et des mélodies plus dansables. Cela nous a aussi fait découvrir les talents de musiciens des trois membres du groupe, et particulièrement de David et Néman.

La musique était excellente; on ne peut rien dire sur la prestation du groupe, sauf que cela valait la peine d’être entendu.

Par contre, on a quand même pu critiquer un peu l’endroit et l’ambiance: salle coincée, sans véritable aération, trop remplie, poussiéreuse, sans places assises…et en plus avec une acoustique terrible, qui ne mettait pas vraiment en valeur la voix de David et qui rendait le lieu trop bruyant; publique trop agité, certains étaient là pour danser sans véritablement prêter attention à la musique, un peu comme à un cours de fitness…et tant pis pour l’univers poétique de nos héros. La prochaine fois, on leur conseille de chanter dans un théâtre: au moins leur musique résonnera dans un espace à la auteur de leur talent, et nous on pourra s’assoir et les écouter calmement.

Malgré tout, et surtout malgré ma crise d’asthme qui s’est déclenchée juste à la fin du concert, c’était quand même un superbe spectacle. Pour nous quitter en beauté, voici une autre chanson qui nous plait beaucoup, “My baby is afraid of sharks”. Bonne route!

mercredi 16 novembre 2011

CQFD (ou, pour les italophones, “come volevasi dimostrare”)

La liste des ministres du gouvernement Monti a été dévoilée aujourd’hui. Voici ce qu’on n’aime pas (mention Rien-A-Signaler pour les ministres sur lesquels on n’a aucune critique à faire pour l’instant).

Corrado Passera, ministre du développement et infrastructures Banquier (Intesa Sanpaolo), il sort de l’université privée Bocconi et a une véritable expertise en la restructuration d’entreprise (dont celle de la poste italienne: 20.000 postes de travail en moins).
Paola Severino, ministre de la justice Avocat, elle enseigne à l’université privée LUISS, se trouvant sous l’aile de Confindustria (équivalent italien du MEDEF).
Lorenzo Ornaghi, ministre des biens culturels Recteur de l’Université Catholique du Sarcé Coeur, directeur de la revue catholique “Vita e pensiero”, vice-président du quotidien catholique “Avvenire”.
Renato Balduzzi, ministre de la santé Déjà conseiller juridique de plusieurs ministères par le passé, il a été président national du “Mouvement ecclésial d’engagement culturel” (anciennement “Mouvement diplômés de l’Action Catholique), il fait partie du “Mouvement International des Intellectuels Catholiques” et de l’”International Catholic Movement for Intellectual and Cultural Affairs”.
Corrado Clini, ministre de l’environnement Un médecin qui a pris sa licence en 1972, est devenu directeur de département en 1975 (! bizarre!). Il est cependant employé dans les activités du ministère de l’environnement au plan national et international depuis 1980.
Piero Gnudi, ministre du tourisme et du sport Ancien président d’ENEL (équivalent italien de EDF), membre de l’exécutif de Confindustria (équivalent italien du MEDEF), membre du conseil d’administration d’Unicredito Italiano
Pietro Giarda, ministre des rapports avec le parlement Sort de l’Université Catholique su Sacré Coeur (Milan), où il travaille. Il a déjà été membre du gouvernement dans les années 1990.
Andrea Riccardi, ministre de la coopération internationale Professeur d’historie du christianisme, il est le fondateur de la “Communauté de Sant’Egidio”, organisation de bienfaisance d’inspiration catholique. Il est un ancien membre de “Communion et Libération
(organisation de laquelle il a pris ses distances).
Francesco Profumo, ministre de l’instruction RAS (presque; le déjà président du CNR italien est en réalité membre de plusieurs conseils d’administration, dont Unicredit Private Bank et Telecom Italia).
Giulio Terzi, ministre des affaires étrangères RAS (presque; il sort du monde diplomatique mais fait partie d’une famille “noble”, dont les possessions foncières sont documentés déjà avant l’an 1000).
Elsa Fornero, ministre du welfare RAS, elle s’est toujours occupée de prévoyance et retraites. Cependant, elle collabore avec “Il Sole 24 ore”, organe de presse de Confindustria (équivalent italien du MEDEF).
Mario Catania, ministre de l’agriculture RAS, faisait déjà partie du ministère de l’agriculture, où il s’occupait de politiques européennes et internationales.
Enzo Moavero Milanesi, ministre des affaires européennes RAS, il s’est toujours occupé d’Union Européenne
Fabrizio Barca, ministre de la cohésion territoriale RAS, il s’est toujours occupé de développement régional
Giampaolo Di Paola, ministre de la défense RAS, il a une longue carrière militaire dans le domaine des sous-marins et de l’OTAN.
Anna Maria Cancellieri, ministre de l’intérieur RAS, elle sort du monde des préfectures.

Certes qu’avec ces présupposés l’Etat italien ne risque pas d’évoluer vers un modèle plus socio-démocratique. Il y a en effet tout ce qu’il faut pour que des réformes néoliberales dures, avec restructurations massives du secteur publique et coupes aux budgets sociaux se mettent en place, et cela pour des raisons évidentes. De plus, comme nous avions déjà prévu, on remarque le rôle de l’église catholique et des lobbies qui s’y rattachent dans certains des ministères attribués. Avec une telle influence du clergé, on n’est pas sortis de l’auberge non seulement pour ce qui concerne les droits civiques (par exemple le pacs), mais aussi pour ce qui est de droits bien plus fondamentaux comme celui à l’avortement (remis en discussion à cause du nombre croissant de “médecins objecteurs” un peu partout dans le service publique italien) et celui à la FIV (à propos de comment le droit à la fécondation in vitro est bafoué, par exemple à l’encontre des porteurs de maladies génétiques comme la thalassémie, voir les lignes-guide diffusées aujourd’hui même; on y reviendra prochainement).

Un gouvernement pour le peuple, et qui ait une vision au loin, n’est donc pas né ce soir et il ne va pas naitre de si-tôt, puisque apparemment Monti veut rester en place jusqu’en 2013 (sans aucune légitimité digne de ce nom, il faut le dire). Face à tout cela, on n’a qu’un désir: voir apparaitre une nouvelle classe dirigeante qui ne soit pas simplement réactive, mais qui au contraire propose un projet de société qui élève l’esprit des citoyens et le niveau de l’Etat, qui vise la création d’un Etat moderne, laïque et républicain au sens le plus noble du terme. En bref, pour le dire avec une chanson, qui Lift us up!

Pour nous quitter en beauté, voici donc “Lift me up” du new-yorkais Moby. Bonne route!

Moby, Lift me up.

dimanche 13 novembre 2011

Berlusconi adieu, bonjour Monti

Berlusconi, présent sur la scène politique italienne depuis 1993, a démissionné hier soir et a ainsi enterré sa vie politique. Enfin, ou mieux hallelujah, comme l’ont dit tant les manifestants italiens hier soir que les pages de The Economist ce matin.

Hallelujah – Resistenza Musicale Permanente. Rome, 12.11.2011

Des manifestations de joie ont eu lieu un peu partout, dans le monde réel et sur la toile, notamment sur les réseaux sociaux, par exemple sous les hashtags finecorsa (fin de la course) et maipiù (plus jamais). Beaucoup de média traditionnels ont diffusé les images de la contestation devant les palais de pouvoir, avec des commentaires pseudo-étonnés…et une question s’impose: pourquoi les mêmes médias, y compris ceux de gauche, n’ont pas diffusé ces images avant? La contestation des simples citoyens faisait rage depuis un bon moment et les membres du gouvernement étaient depuis longtemps forcés à se cacher et à éviter toute apparition en des lieux publics “non protégés” (par exemple: la rue), mais personne n’en a fait mention.

Un bon exemple de cette cosmétique de l’information est la visite du désormais ancien premier ministre à Nuoro en 2009, complètement blindée et appuyée par une présence massive de forces de l’ordre (dont un sniper): la contestation a bel et bien eu lieu dans la rue (j’étais moi-même là pour en témoigner), mais les médias n’ont transmis que les images prises à l’intérieur d’une salle remplie de militants du parti au gouvernement.



Contestation pendant la visite de Berlusconi à Nuoro, 17.1.2009

Quoi qu’il en soit, ce personnage est désormais politiquement mort. Ceci ne veut pas dire que le berlusconisme ne laisse pas de traces sur la scène politique italienne. En effet, les institutions fondamentales de la démocratie ont été progressivement privées de leurs rôles, le débat politique et le discours publique tout court se sont centrés sur la personne de Silvio Berlusconi, et pour finir les mots eux mêmes se sont vidés de leur sens. Voici donc l’héritage de 17 ans de berlusconisme: un pays en ruines et sans fantaisie, puisque, si on en croit Wittgenstein, les limites de notre langage signifient les limites de notre propre monde.

Quelques jours en arrière, j’avais émis la  prévision que le successeur au poste de premier ministre aurait été quelqu’un d’agrée par l’église catholique. Cette affirmation, qui a pu paraitre un peu bizarre a certains, était motivée par la constatation que la seule institution qui ait survécu au cataclysme berlusconien est exactement l’église, une organisation qui a historiquement toujours eu un grand pouvoir en Italie et qui peut aussi compter sur une grande disponibilité de moyens (ce qui, en temps de crise, est plutôt rare). A la suite de réunions qui ont débuté cet été, la décision semble désormais s’être arrêtée sur Mario Monti, économiste libéral formée à l’université privée milanaise Bocconi (donc idéal pour mettre en place les politiques néolibérales dont on a déjà partiellement parlé), ex-commissaire européen (donc bien aimé par les autorités de l’UE, qui tiennent les cordons de la bourse)…et (surprise surprise) ancien élève des jésuites, catholique et déjà appuyé par l’église (tant en Italie qu’en France), qui l’avait entre autres déjà suggéré comme chef de la République en 2006 (cela n’a jamais abouti).

Si l’investiture de Monti semble désormais certaine, il y a encore quelques doutes sur les ministres qui feront partie de son gouvernement. Une chose est sure: si on se fie aux noms qui circulent sur la presse italienne, on peut remarquer la présence de vieux politiciens bien connus, qui ont déjà eu l’occasion de démontrer leurs talents par le passé et qui ont remarquablement échoué…tel un fromage qu’on n’a pas aimé, et qu’on ressort du fond du frigo, un peu moisi, parce qu’on on a oublié de faire les courses. Pourquoi les partis soutiennent-ils donc un tel bouquet choisi?

La réponse n’est pas si facile à trouver (merci MF pour la conversation intéressante qui a mené à l’analyse qui suit). Il se pourrait que ce choix soit motivé par un vide absolu, mais cette option est difficile à croire, puisque dans quelques mois il y aura les élections et les partis devront bien présenter quelques candidats. De plus, dans un pays qui compte 945 parlementaires (contre 246 en Suisse, 535 aux USA, 614 en Espagne, 925 en France), c’est invraisemblable qu’on ne trouve que des vétérans pour occuper le poste de ministre. Il faut donc examiner une deuxième option. Comme on l’a déjà dit, les mesures prochainement adoptées par le gouvernement Monti seront calquées sur les demandes de Bruxelles: en gros, des coupes au budget de l’Etat et des restructurations de l’appareil étatique en pur style néolibéral… tout ce qu’il y a de plus impopulaire. Puisque les choses impopulaires ne sont pas du gout des électeurs, tout le monde s’en est lavé les mains jusqu’à maintenant. Voici pourquoi les élus en chargent le futur “gouvernement technique”: pour qu’il fasse le sale boulot (ce que les “marchés financiers” attendent) et qu’après les candidats puissent se représenter aux élections les mains propres, en disant “Ce n’est pas de notre faute”. Parfaitement logique et compréhensible.
Le problème avec ce genre de choix est double. D’un côté, cela remet en cause l’essence même de la démocratie, puisque ce ne sont plus des élus qui se chargent de la chose publique, mais des “illuminés” choisis selon d’autres critères que le vote des citoyens. De l’autre côté, la notion même de gouvernement en sort ébranlée, vu que la gestion de l’Etat devrait impliquer le bien de la population…et, si jusque là elle a impliqué la sauvegarde des intérêts d’un seul individus, elle va désormais impliquer la réponse à des impératifs provenant des “marchés financiers” (impératifs  définis de manière plutôt obscure par des systèmes fumeux et non-redevables envers les électeurs).

En somme, Berlusconi est politiquement enterré (même s’il essaie de sortir de sa tombe, voir ci-contre), mais on n’est pas prêts d’en découdre avec le berlusconisme, ni d’assister à l’émergence d’une classe dirigeante renouvelée en Italie.

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Et, qui plus est, les italiens devront se préparer à se serrer sérieusement la ceinture, avec les plans néolibéraux que le gouvernement Monti se prépare a adopter.
Triste et lourd héritage celui de cette période obscure de l’histoire italienne. En attente de voir comment tout cela va évoluer, changeons d’air: voici un Héritage bien meilleur et qui vient d’ailleurs: il s’agit du nouvel album du groupe suédois Opeth, un rock progressif de haute qualité qui n’est pas sans rappeler des grands classiques des années 1970. Tiré de cet album, “The Devil’s Orchard”: une excellente sonorité, proche de certaines sonorités présentes dans “Jesus Christ Superstar”, et un beau texte, plutôt adéquat pour ces temps troubles. Bonne écoute et bonne route!

Opeth–The Devil’s Orchard. Heritage, 2011

mardi 8 novembre 2011

Chute de Berlusconi? Un peu de saine autocritique, svp

Il y a à peine quelques dizaines de minutes, la nouvelle de la prochaine démission du premier ministre italien Silvio Berlusconi a été transmise par les principaux médias nationaux et internationaux, et de là elle a atterri sur les différents réseaux sociaux et dans les conversations de nombreux de mes compatriotes. Si on s’en tient aux quotidiens italiens et aux réseaux sociaux, une seule atmosphère triomphante semble dominer: tous se réjouissent de ce résultat, comme s’il s’agissait s’un but que les opposants ont réussi a atteindre à la suite d’un âpre combat. Pour s’en rendre compte, il suffit de penser au tag qui a été choisi sur Twitter pour identifier la chute du gouvernement: resadeiconti, soit quelque chose comme “l’heures des comptes”, celle qui sonne à la fin de la bataille.
Voilà donc que tous (ou presque) envahissent l’espace public avec des messages de joie et célébration, des “finalement!” enthousiastes, des déclarations de haine envers cette partie politique (et d’amour envers la partie adverse). Tout se passe comme si toutes les fautes tombaient sur une poignée d’hommes et de femmes, et non pas sur tout un système qui les a élus, soutenus et laissés au pouvoir pendant des nombreuses années. Pire encore, un discours dominant est construit sur le postulat (faux) que depuis un temps incalculable les partis et mouvements de la gauche italienne employaient toutes leurs énergies pour faire tomber ce système de pouvoir.
Or, si beaucoup de citoyens italiens ont une mémoire courte (chose que l’on peut comprendre et même excuser: après tout, ce sont les mêmes qui ont voté pour “Mister B.” à plusieurs reprises), vous, chers lecteurs, ne tombez surtout pas dans la même erreur!
N’oubliez pas que les partis italiens de gauche ont été pendant toutes ces années autant impliqués et connivents que les partis de droite dans le maintient de certains louches personnages au pouvoir. Ils n’ont pas abandonné les travaux du parlement, ils n’ont pas réagi aux innombrables gaffes et débordements politiques du gouvernement Berlusconi, ils n’ont pas (et pas encore) proposé des sérieuses alternatives politiques, ils n’ont pas (et pas encore) pris position en faveur des jeunes, des femmes, des pauvres, des employés du secteur publique et de nombreuses autres catégories que cet establishment a quotidiennement insultées, méprisées et marginalisées.
De plus, ne vous laissez pas tenter par l’illusion qu’une nouvelle classe politique novatrice pourrait enfin émerger en Italie: il n’en sera rien! Si le gouvernement Berlusconi va tomber, ce sera seulement pour être substitué par un autre gouvernement Berlusconi ou par un gouvernement technocratique, et si élections y aura, elles auront lieu avec la même loi électorale que maintenant, donc avec des candidats choisi par les partis (…partis qui sont les mêmes qui à travers leur (in)action ont permis que Berlusconi et sa compagnie restent au gouvernement jusqu’à maintenant…).
Très probablement, la chute de Berlusconi est à mettre en relation avec un accord en cachette entre les politiciens du centre (centre-droit et centre-gauche) et les hauts prélats du Vatican, ce qui était dans l’air depuis cet été déjà. Puisque la classe politique italienne actuelle est nulle (et non-advenue, pourrait-on dire), et puisque les électeurs ont une mémoire équivalent à celui d’un poisson rouge (un tour du bocal au grand maximum), il ne faudra pas s’étonner de voir arriver au pouvoir une série de politiciens proprets et politiquement corrects, proposant de se serrer la ceinture mais de continuer tout de même à encourager des “politiques pour la famille”, des libéralisations de certains secteurs spécifiques (comme les hôpitaux, que l’église sait “si bien” financer et administrer) et des structures paritaires (écoles privées, centres d’accueil…). Bref, un Etat providence boiteux, qu’au lieu de se renouveler (ce qui aurait requis tout de même des vrais leaders) transformera l’assistance sociale en secours pieux.
Dans tout cela, pas l’ombre d’une proposition pour la politique industrielle, ou pour la politique éducative, ou encore pour le secteur public et l’administration, ou le système fiscal. Zéro. Et certes, l’auto-célébration des partis de gauche, menée sans remettre en cause leurs responsabilité dans la naissance, le triomphe et la longue survie agonisante du système berlusconien (et en sautant une étape fondamentale dont certains des anciens militants de gauche devraient se souvenir: l’autocritique), ne permet pas de repartir sur des bases nouvelles et dans des directions positives.
Bien que les bases du système restent inchangées, et qu’il s’agisse d’une fin bien illusoire, rien ne nous empêche de nous consoler de cet état de choses en écoutant de la bonne musique. Et puisque il s’agit d’une “fin” (plus dans le discours qui est en train d’être construit que dans les faits), rien de mieux que la merveilleuse “The End” de “The Doors”. Bonne route!
The Doors–The End

dimanche 6 novembre 2011

Get your sting and blackout @ Arena de Genève

Dans ces temps d’ennuie musicale, où très peu d’artistes sortent du lot et méritent qu’on leur prête une oreille attentive, un concert comme celui des Scorpions vendredi passé à L’Arena est plus que bienvenu! L’étape genevoise du dernier tour du groupe allemand a été ouverte par le groupe français Karelia, une formation metal qui, au lieu de réchauffer l’ambiance, l’a bien refroidie (du moins en ce qui nous concerne) en submergeant les spectateurs avec du pur bruit. En effet, la qualité des guitaristes était plutôt bonne, mais la voix du chanteur ne suivait pas; avec une constance inégalée, ne se contentant pas de ruiner leurs propres morceaux, ils ont assommé l’audience avec des reprises (ratés) de Moby et des Queen. Après 35 minutes, on a enfin été délivrés de cette souffrance et…ta-dam: le (vrai) concert a enfin commencé!
IMG_1586 La scénographie était assez dépouillée, avec plusieurs écrans cubiques sur scène et trois grands écrans sur le fond; seul élément mobile, la plateforme du batteur pouvait s’élever et descendre.
Dans un décor si sobre, la scène a été complètement remplie par la présence des membres du groupe et par leur sonore phénoménal! Quelle voix, et quelles musique!
IMG_1596
En parcourant leurs chansons les plus connues, les Scorpions nous ont proposé un enchainement de prouesses instrumentales et vocales.
C’était un vrai plaisir d’admirer  l’habileté des guitaristes (1, 2) et du bassiste, l’énergie du chanteur, le talent du batteur.
En particulier, James Kottak a proposé une prestation solo magistrale; à côté, vous pouvez en voir une similaire – sauf pour la vidéo qui était diffusée en contemporaine sur les écrans géants: excellent, pas vrai?
James Kottak en solo, live à Bucarest
La musique était juste exceptionnelle, mais c’était encore plus agréable de voir des artistes qui prennent autant de plaisir sur scène et qui sont capables de le partager avec leur public.
En effet, on ne mentira pas en affirmant que dans l’Arena il y avait une atmosphère d’enfer, avec des fans jeunes et moins jeunes enthousiastes et partageant la même passion pour la bonne musique…regardez-en un exemple ici à côté!
Les Scorpions live à l’Arena de Genève, 4.11.2011
En somme, un superbe concert, qui reprenait certes des éléments d’autres shows du groupe – par exemple celui d’Avenches en Aout dernier, merci C.A. et J.M. pour l’info! – mais qui a été un évènement unique pour tous ceux qui étaient là!
Et pour nous quitter en beauté, maintenant que le concert est fini, rien de mieux que “When the smoke is going down” (merci S.R. pour la suggestion!). Bonne écoute, et bonne route!
Scorpions, When the smoke is going down