Jeudi dernier était la fête de l’Ascension, premier jour d’un long week-end de quatre jours. Par un temps quelque peu ensoleillé mais tout de même plutôt frisquet, rien n’est mieux que se promener et s’adonner à la lecture. Parmi mes lectures, voici le compte rendu d’un bouquin qui m’arrive tout frais d’Italie , le “Dictionnaire des choses perdues” du chanteur et écrivain Francesco Guccini.
Guccini, F. (2012) Dizionario delle cose perdute”. Milan: Mondadori. (disponible aussi en ebook, seulement en italien)
Guccini, duquel on a déjà pu apprécier quelques romans policiers et plusieurs livres autobiographiques, nous livre ses mémoires de gamin bolognais avec un grand sens de l’humour, tout en faisant preuve d’un profond respect pour les rêves et les ambitions des gosses de cette époque et de leurs parents.
On retrouve ainsi les premiers chewing-gums, les insecticides contre les mouches, les voitures de masse, les cinémas de 3ème vision et même des trucs qui ont aujourd’hui presque complètement disparu, comme les glacières, les cuisinières à bois, les “liqueurs en poudre” (obtenus mélangeant des aromes chimiques, par exemple de whisky, et de l’alcool) et les seringues en verre.
Avec juste un soupçon de nostalgie (mais pas trop quand même: d’accord, les jeux dans la rue sont peut-être mieux que la PSP, mais tout le monde préfère les seringues en plastique à celles en verre…!), l’auteur nous livre un beau témoignage d’un monde à cheval entre tradition et modernité. Encadré par un regard bienveillant et presque attendri, le sentiment qui domine le livre est sans doute l’étonnement. C’est la stupeur typique des enfants, mais aussi celle de tout un pays qui s’ouvre à la modernité, et qui découvre avec enthousiasme les nouveautés…surtout celles qui débarquent des USA.
La fascination pour l’Amérique dans l’Italie des années 1950-1970 a longtemps passionné Guccini, qui en a parlé dans nombre de ses chansons (par exemple, l’atmosphère rurale de 100 Pensylvania Ave, le rythme et les accents de Talkin Milano, la déception suite à son premier voyage aux USA de laquelle nait L’orizzonte di K.D., les rêves d’Amérique faits dans sa terre natale présents dans Piccola città, les mémoires des émigrés mises en avant dans Amerigo, la description d’une rencontre sur la route dans Autogrill, le déclin et l’overdose sécuritaire et antilibérale contre laquelle il se révolte dans Canzone per Silvia). Dans ce livre elle ressort insérée dans l’époque qui était celle de sa jeunesse, contextualisée donc et de ce fait plus facile à comprendre.
Francesco Guccini en concert, date inconnue (années 1970?)
Si la poétique de Guccini est centrée sur les histoires (il s’inspire des chanteurs d’histoires – ou cantastorie - qui exerçaient dans sa région jusque dans les années 1970) et sur la description profonde des personnages et de leurs émotions, il fait une large place à la politique (notamment, il prône un anarchisme de gauche; voir par exemple la chanson militante La locomotiva), à la littérature (comment ne pas mentionner Cirano ou Don Chisciotte) et à l’histoire (par exemple, dans Bisanzio), sans oublier l’humour (qui triomphe dans l’album Opera Buffa).
Dans toute cette œuvre, les USA entrent de manière transversale, avec des références multiples qui mêlent la fascination et la critique ouverte envers certains modes de fonctionnement. |
Entre autres, pour tous ces multiples cotés de son art qui parlent des USA, qu’on retrouve aussi dans son Dictionnaire des choses perdues, il va recevoir demain 21 mai 2012 une licence honoris causa de la part de l’American University of Rome.
Pour avoir une idée plus précise de cet ouvrage en voici un extrait:
“Quand les américains arrivèrent en Italie, au temps de la guerre, en plus que les cigarettes parfumées ils amenèrent tout un tas d’autres trucs qui étaient alors inconnus, ou presque, chez nous. La Coca-Cola, par exemple, le beurre de cacahuètes, les pancakes (les desserts de Donald Duck) et le chewing-gum. Avec les chocolats (Hershey) et les bonbons multicolores avec un trou au milieu qui semblaient des bouées de sauvetage (les Life Savers), les G.I. étasuniens lançaient aux gosses des paquets mystérieux à la forme allongée; une fois déballés, ils contenaient des petites tablettes aussi allongées et parfumées. Bonbons américains? Peut-être. Mais quoi faire de ces mystérieux bonbons? Droit dans la bouche. Cependant, à force de mâcher, ce bonbon perdait sa saveur et il ne se dissolvait pas, et donc on l’avalait rapidement. (…)
Mais (…): finie la guerre, fini le chewing-gum? Non, bien entendu, parce que la vague masticatrice ne semblait pas diminuer et furent créés des produits très italiens appelés “chiclette” ou avec plein d’autres noms suivant les régions.
Par exemple, il y avait un gros truc rose, qui au début avait le gout d’un bonbon et n’était pas aisé à mâcher, dont la saveur s’estompait très tôt. Alors, les enfants malins le plongeaient dans le sucre et le remâchaient, parce qu’ils ne voulaient pas le jeter; mais dès qu’ils avaient mal à la mâchoire ils le mettaient dans leur poche, pour le sortir dans le futur et le remettre dans leur bouche après l’avoir tant bien que mal nettoyé des miettes et d’autres saletés. (…)
Mais le vrai coup de génie fût l’invention de la bubble-gum ( je crois, une invention américaine), la chiclette qui faisait des ballons. Tu mâchais, mâchais et puis, après avoir vérifié la consistance entre la langue et les dents, tu soufflais doucement jusqu’à obtenir la sortie, entre les lèvres, d’un petit ballon qui pouvait avoir des dimensions conséquentes pour les plus habiles. Il éclatait aussi, avec un bruyant “chack”, qui, quand répété plusieurs fois à la suite, était très propice pour énerver un adulte qui se serait trouvé aux alentours (et aussi pour faire déclencher une baffe). Seul désavantage, le ballon pouvait exploser sur le visage, en rendant très difficile le nettoyer des filaments gommeux. Mais quand on est enfants ce n’est pas le genre de choses dont on se soucie.” (pp. 9-12)
J’aime beaucoup Francesco Guccini, aussi bien pour ses chansons (que je peux affirmer connaitre depuis le berceau) que pour ses livres. Pour nous quitter, donc, rien n’est plus adéquat que son répertoire. Comme je les connais toutes j’ai du mal à en choisir une seule; je vous en propose donc deux parmi mes préférées (ou, peut-être, mes préférées dans l’absolu). Il s’agit de Vedi Cara, chanson extraite de son 2ème album (1970) et de Canzone quasi d’amore, extraite de son 7ème album (1976). Bonne écoute, et bonne route!
Tu conosci Guccini dalla culla, sicuro!E io comunque dall'adolescenza, e nonostante sia cresciuta con le sue canzoni, risentirle mi emoziona ancora. E' vero le sue canzoni son tutte belle, io però ho sempre avuto una speciale predilezione per quelle in cui parla di sè, dei suoi sentimenti, dei suoi dubbi, che poi son quelli di tutti, le stesse sensazioni, lo stesso malessere che va di pari passo con la vita di tutti gli esseri umani, o almeno di quasi tutti. E credo che sia questa capacità di esprimere così bene il malessere dell'uomo di oggi che lo rende così grande. E le canzoni che hai scelto fanno proprio parte di quel gruppo, più le ascolto più mi convinco di quanto sia "grande" Guccini. E "grande" è un termine così abusato che mi sembra riduttivo... Purtroppo ho letto solo il primo dei suoi libri, appena ho tempo dovrò rimediare...Sono contenta che gli abbia dedicato quest'articolo, dopo un pò di "astinenza" mi è venuta voglia di riascoltare le sue canzoni per l'ennesima volta. Già ieri sera c'era un programma su rai storia sul linguaggio delle canzoni e un signore dell'Accademia della Crusca intervistava Guccini, Mogol , Vecchioni e un poeta dibattendo sul fatto di considerare o meno alcune canzoni delle poesie, dato che per esempio alcune di Guccini sono già nelle antologie. Alla fine hanno letto "incontro" e poi l'hanno fatta sentire... Bè hanno concluso che le canzoni sono cosa diversa dalla poesia perchè non si possono scindere le parole dalla musica... è vero...sono molto più delle poesie, perchè le emozioni che si provano ascoltandole, almeno per me, sono molto più grandi e coinvolgenti...sopratutto se chi canta si chiama Guccini....Ciao bacioni, Francesca
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