Cette semaine une nouveauté est apparue sur le campus de l’Unil: la monnaie complémentaire Swap. Il existe plusieurs sortes de monnaies complémentaires: les monnaies virtuelles, utilisées dans les “mondes persistants” comme Second Life, les monnaies à logique lucrative, utilisées par exemple dans les programme de fidélisation comme les Miles et enfin les monnaies sociales, dont les Swaps font partie, qui ont comme but de réformer en profondeur le système économique actuel.
Grâce à la plateforme easyswap, chaque membre de la communauté universitaire peut créer un compte et effectuer des échanges de biens et services en les payant avec la monnaie sociale nommée Swap.
Les nouveaux usagers ont un paquet initial de 100 swaps pour débuter leurs activités dans le réseau; cette monnaie ne peut pas être convertie en de l’argent réel et ne peut être échangée qu’avec d’autres membres du réseau en échange d’autres biens ou services. Le but de l’opération est de favoriser la durabilité des biens de consommation (“échanger est mieux que jeter”), de créer ou renforcer des liens de solidarité ou convivialité entre les membres de la communauté (puisque les échanges peuvent aussi être gratuits) et, finalement, de faire réfléchir sur la construction sociale de la valeur et de l’usage de l’argent dans le système économique actuel (pouvoir d’achat, spéculation, thésaurisation et taux d’intérêt, marché des devises). En somme: soutenabilité + convivialité + responsabilité.
La traduction française du mot anglais “swap” est “échange”, ou encore “troc”, qui s’adapte bien (du moins à première vue) au concept de la monnaie virtuelle. Cependant, le mot “swap” fait désormais partie aussi du vocabulaire français, grâce à la diffusion de l’instrument financier dérivé du même nom, permettant de distribuer le risque de certaines opérations spécifiques. Clairement, les Swaps de la plateforme easyswap se situent plutôt sur le versant “troc”, avec un avantage particulier. En effet ils permettent, comme toute monnaie, de servir d’intermédiaire dans les échanges et donc de dépasser le problème fondamental du troc (la difficulté de trouver deux volontés concordantes sur les biens à échanger).
Les Swaps ont donc en commun avec les monnaies réelles la fonction d’intermédiation dans les échanges, mais les deux autres fonctions principales de la monnaie (réserve de valeur et unité de compte) n’appartiennent pas complètement aux Swaps qui ne peuvent pas être stockés en quantité supérieure à 500 pour chaque utilisateur et qui ne servent pas vraiment pour indiquer la valeur reconnue d’un bien ou d’un service dans la communauté de swapeurs. A ce propos, on peut souligner que tout ajout d’annonce (offre de service, vente ou location) fait gagner des swaps à l’annonceur. Ceci est valable même si le “prix” fixé est égal à zéro swaps, ce qui implique que de quelque manière les swaps n’indiquent pas seulement la valeur des biens et services, mais aussi l’engagement dans la communauté (donc, conséquemment, l’adhésion aux valeurs exprimées par la communauté elle-même).
La création d’une monnaie ex-novo est en soi un argument intéressant, mais en plus une invention telle que le Swap renferme un défi de taille. En effet il s’agit non seulement d’une monnaie déconnectée des autres institutions réelles (gouvernement, banques etc.) qui normalement interviennent dans la vie monétaire, mais aussi d’un instrument sensé fonctionner selon les principes du libre marché, seulement grâce à l’auto-organisation des membres du réseau qui fixent le prix des transactions et sans presque aucun lien avec le “marché réel”.
Pour commencer à observer comment ce marché parallèle se serait organisé, je me suis donc inscrite et j’ai créé un profil sur la plateforme. La procédure est très simple et le graphisme rappelle celui des social networks; malgré cela, les fonctions de la plateforme sont limitées et tendent à réduire au maximum la partie virtuelle de l’interaction en faveur du monde réel.
Une fois le profil complété, je suis allée lire le mode de fonctionnement et puis fouiller parmi les annonces (qui, à l’heure actuelle, sont à peine 39), en me demandant comment les prix allaient être fixés et s’ils auraient eu un rapport avec les prix dans le monde réel (par exemple en francs suisses). Dans des nombreux cas, les monnaies complémentaires ont ou acquièrent une valeur égale à celle de la monnaie courante dans le pays où elles sont utilisées (1=1); tel est par exemple le cas du Dollar de Toronto. En consultant le guide en ligne de la plateforme easyswap, j’ai constaté que les prix pour les services devraient être fixés selon des tarifs qui suivent plus ou moins ceux courants en francs suisses (par exemple: “couture simple” ou “baby sitting” entre 0 et 20 swaps de l’heure; “ménage de fond” ou “cours de cuisine” entre 21 et 40 swaps de l’heure; “traductions complexes” ou “webdesign avancé” entre 41 et 64 swaps de l’heure); le prix des biens échangés, au contraire, peut être librement fixé. Le marché est donc déjà un peu structuré.
Malgré le fait que des règles de fonctionnement du système Swap et des échanges qui y ont lieu aient été, comme on a vu, plus ou moins établies, on constate que certains des usagers du système (à l’instant on compte 215 profils) ont un peu de mal à comprendre le but du jeu et sortir de la logique dominante. Ainsi, en lisant les annonces, il n’est pas rare de tomber sur des biens en vente ou location ou des services proposés en échange de véritable argent (chf).
Plusieurs explications de cela sont possibles: une utilisation de la plateforme comme simple “site d’annonces”, sans considération pour la dimension conviviale; une méfiance des usagers vis-à-vis des Swaps, puisque ils peuvent être utilisés seulement sur un circuit qui est récent et qui n’a pas d’avant-postes dans le monde réel (par exemple, aucun commerce n’accepte les swaps pour l’instant); un manque d’intérêt pour une monnaie sociale qui, comme nous avons vu, n’a pas les mêmes caractéristiques que les autres monnaies et pour les valeurs qu’elle véhicule.
Seul l’avenir et le développement des échanges en swap nous permettront de mieux connaitre le système et d’en saisir les autres avantages, problèmes ou potentialités. En attendant, voici un grand classique musical dédié non pas à la monnaie, mais à l’argent. Bonne route!
Grâce à la plateforme easyswap, chaque membre de la communauté universitaire peut créer un compte et effectuer des échanges de biens et services en les payant avec la monnaie sociale nommée Swap.
Les nouveaux usagers ont un paquet initial de 100 swaps pour débuter leurs activités dans le réseau; cette monnaie ne peut pas être convertie en de l’argent réel et ne peut être échangée qu’avec d’autres membres du réseau en échange d’autres biens ou services. Le but de l’opération est de favoriser la durabilité des biens de consommation (“échanger est mieux que jeter”), de créer ou renforcer des liens de solidarité ou convivialité entre les membres de la communauté (puisque les échanges peuvent aussi être gratuits) et, finalement, de faire réfléchir sur la construction sociale de la valeur et de l’usage de l’argent dans le système économique actuel (pouvoir d’achat, spéculation, thésaurisation et taux d’intérêt, marché des devises). En somme: soutenabilité + convivialité + responsabilité.
La traduction française du mot anglais “swap” est “échange”, ou encore “troc”, qui s’adapte bien (du moins à première vue) au concept de la monnaie virtuelle. Cependant, le mot “swap” fait désormais partie aussi du vocabulaire français, grâce à la diffusion de l’instrument financier dérivé du même nom, permettant de distribuer le risque de certaines opérations spécifiques. Clairement, les Swaps de la plateforme easyswap se situent plutôt sur le versant “troc”, avec un avantage particulier. En effet ils permettent, comme toute monnaie, de servir d’intermédiaire dans les échanges et donc de dépasser le problème fondamental du troc (la difficulté de trouver deux volontés concordantes sur les biens à échanger).
Les Swaps ont donc en commun avec les monnaies réelles la fonction d’intermédiation dans les échanges, mais les deux autres fonctions principales de la monnaie (réserve de valeur et unité de compte) n’appartiennent pas complètement aux Swaps qui ne peuvent pas être stockés en quantité supérieure à 500 pour chaque utilisateur et qui ne servent pas vraiment pour indiquer la valeur reconnue d’un bien ou d’un service dans la communauté de swapeurs. A ce propos, on peut souligner que tout ajout d’annonce (offre de service, vente ou location) fait gagner des swaps à l’annonceur. Ceci est valable même si le “prix” fixé est égal à zéro swaps, ce qui implique que de quelque manière les swaps n’indiquent pas seulement la valeur des biens et services, mais aussi l’engagement dans la communauté (donc, conséquemment, l’adhésion aux valeurs exprimées par la communauté elle-même).
La création d’une monnaie ex-novo est en soi un argument intéressant, mais en plus une invention telle que le Swap renferme un défi de taille. En effet il s’agit non seulement d’une monnaie déconnectée des autres institutions réelles (gouvernement, banques etc.) qui normalement interviennent dans la vie monétaire, mais aussi d’un instrument sensé fonctionner selon les principes du libre marché, seulement grâce à l’auto-organisation des membres du réseau qui fixent le prix des transactions et sans presque aucun lien avec le “marché réel”.
Pour commencer à observer comment ce marché parallèle se serait organisé, je me suis donc inscrite et j’ai créé un profil sur la plateforme. La procédure est très simple et le graphisme rappelle celui des social networks; malgré cela, les fonctions de la plateforme sont limitées et tendent à réduire au maximum la partie virtuelle de l’interaction en faveur du monde réel.
Une fois le profil complété, je suis allée lire le mode de fonctionnement et puis fouiller parmi les annonces (qui, à l’heure actuelle, sont à peine 39), en me demandant comment les prix allaient être fixés et s’ils auraient eu un rapport avec les prix dans le monde réel (par exemple en francs suisses). Dans des nombreux cas, les monnaies complémentaires ont ou acquièrent une valeur égale à celle de la monnaie courante dans le pays où elles sont utilisées (1=1); tel est par exemple le cas du Dollar de Toronto. En consultant le guide en ligne de la plateforme easyswap, j’ai constaté que les prix pour les services devraient être fixés selon des tarifs qui suivent plus ou moins ceux courants en francs suisses (par exemple: “couture simple” ou “baby sitting” entre 0 et 20 swaps de l’heure; “ménage de fond” ou “cours de cuisine” entre 21 et 40 swaps de l’heure; “traductions complexes” ou “webdesign avancé” entre 41 et 64 swaps de l’heure); le prix des biens échangés, au contraire, peut être librement fixé. Le marché est donc déjà un peu structuré.
Malgré le fait que des règles de fonctionnement du système Swap et des échanges qui y ont lieu aient été, comme on a vu, plus ou moins établies, on constate que certains des usagers du système (à l’instant on compte 215 profils) ont un peu de mal à comprendre le but du jeu et sortir de la logique dominante. Ainsi, en lisant les annonces, il n’est pas rare de tomber sur des biens en vente ou location ou des services proposés en échange de véritable argent (chf).
Plusieurs explications de cela sont possibles: une utilisation de la plateforme comme simple “site d’annonces”, sans considération pour la dimension conviviale; une méfiance des usagers vis-à-vis des Swaps, puisque ils peuvent être utilisés seulement sur un circuit qui est récent et qui n’a pas d’avant-postes dans le monde réel (par exemple, aucun commerce n’accepte les swaps pour l’instant); un manque d’intérêt pour une monnaie sociale qui, comme nous avons vu, n’a pas les mêmes caractéristiques que les autres monnaies et pour les valeurs qu’elle véhicule.
Seul l’avenir et le développement des échanges en swap nous permettront de mieux connaitre le système et d’en saisir les autres avantages, problèmes ou potentialités. En attendant, voici un grand classique musical dédié non pas à la monnaie, mais à l’argent. Bonne route!
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